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Le Fantôme de l'Opéra
est là... dans votre esprit !
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Traitement royal
pour le DVD du "Fantôme de l’Opéra" (sorti le 8 septembre 2005),
une adaptation cinématographique de la célèbre comédie musicale
d’Andrew Lloyd Weber. Signée Joel Schumacher, réalisateur de
"L’expérience interdite", "Batman Forever" ou plus récemment
"Phone Game", cette œuvre magistrale rend hommage avec mystère,
élégance et faste au mythe fondé par Gaston Leroux en 1910. Une
occasion de sonder les secrets du Palais Garnier qui inspira,
avec plus ou moins de génie, des générations d’artistes… |
Tout commence en 1861 quand les
travaux du futur Opéra de Paris décidés par Napoléon III
révèlent l’existence d’une nappe phréatique sous l’édifice,
alimentée par un bras préhistorique de la Seine. Indomptable à
cause des inondations permanentes qu’il provoque sur le
chantier, l’architecte Charles Garnier décide de préserver ce
lac souterrain pour assurer notamment une protection contre les
risques d’incendie. La légende de la Grange Batelière est née.
La référence la plus connue du public à cette mystérieuse
rivière souterraine est dans "La Grande Vadrouille" de Gérard
Oury où l’équipée menée par Stanislas LeFort (Louis de Funès) et
Augustin Bouvet (Bourvil) tente d’échapper aux allemands par les
sous-sols de l’Opéra. "Et où cela mène-t-il ?" demande l’un des
fugitifs en dévalant les interminables escaliers souterrains.
Réponse d’outre-tombe : "D’après Victor Hugo, nulle part…".
Utilisées comme cachots pendant la Commune
de Paris en 1870, les premières salles construites sont le théâtre de
crimes atroces. Or, un squelette découvert à l’issue de cette période
trouble inspire la légende du fantôme à Gaston Leroux. Il faut dire que
le théâtre de son histoire était planté : des sous-sols dangereux et mal
connus, une rivière souterraine, un cadavre ! Le cocktail parfait pour
un roman à mi-chemin entre le surnaturel et l’enquête policière.
Écrit peu après "Le Mystère de la chambre jaune" et sa suite "Le parfum
de la dame en noir", "Le Fantôme de l’Opéra" raconte l’histoire
passionnée d’une jeune soprano, Christine Daae, partagée entre son amour
pour le Vicomte Raoul de Chagny et sa fascination pour le fantôme de
l’Opéra qui semble lui avoir insufflé sa voix d’ange. Mais où vit le
fantôme ? Qui est-il ? D’où vient-il ? Que veut-il ?
Pour le découvrir, une agence de communication culturelle,
Purple Beam,
spécialisée dans la visite guidée des coulisses de salles de spectacle,
propose des circuits thématiques à l’Opéra Garnier sur l’histoire du
fantôme. Mais la brochure ne dit pas si les organisateurs ont accès à la
"Chambre des Supplices" qui abrite l’antre de la créature…
Pour ce qui est de la version chantée, c’est en acquérant une édition
originale de cet ouvrage chez un bouquiniste new-yorkais que le
compositeur à succès Andrew Lloyd Weber a l’idée de le transformer en
comédie musicale. La réponse du public est immédiate : 80 millions de
spectateurs se sont succédés entre Londres et Broadway depuis sa sortie
en octobre 1986 !
Après 135 adaptations cinématographiques, Joel Schumacher s’est attaqué
à ce monument du panthéon lyrique avec un style visuel flamboyant qui
n’appartient qu’à lui. Le résultat est à la hauteur du mythe. Il nous
livre un film très ambitieux, aux décors féeriques, qui emprunte
(involontairement ?) certaines clefs du succès au "Moulin Rouge" de Baz
Luhrmann, sans en atteindre la profondeur, pour plonger le spectateur
dans un univers tantôt baroque, tantôt gothique, toujours démesuré.
Un beau clin d’œil est même rendu à la "Belle et la Bête" de Jean
Cocteau lorsque le fantôme attire pour la première fois Christine dans
son repère en empruntant un couloir à la lueur de candélabres tenus par
des bras animés… mais il semble que je sois le seul à l’avoir remarqué ?
Enfin, comment ne pas parler du "Fantôme de l’Opéra" sans évoquer
l'opéra : la partition de Sir Lloyd Weber a été réécrite pour l’occasion
et éditée chez Sony dans un superbe livret collector double CD (version
anglaise). Son célèbre thème du fantôme interprété aux grandes orgues ne
cesse de me hanter quand je vois un lustre brillant de mille feus…
Gaston Leroux serait fier de voir à quel point l’esprit de son œuvre a
été respectée depuis 95 ans, même si le fantôme a gagné en romantisme ce
qu’il a perdu en monstruosité ! Dommage que la plupart des critiques ne
soient pas tendres avec la version de Schumacher. Mais c’est bien connu
: les fantômes ont la vie dure…
Olivier Valentin
>>
Le
site officiel français du film
>> Un
article d'un cahier spécial de L'Express consacré au Paris
Fantastique (Juin 2004) |