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Mezzo-Tinto, de
Montague Rhodes-James (1904)
L’histoire :
Sur les conseils d’un marchand de gravures et autres vieux croquis
topographiques, un collectionneur fait l’acquisition d’un mezzo-tinto
représentant un manoir du début du siècle. Au dos, il peut lire quelques
syllabes d’un nom sur une étiquette à moitié déchirée, lui offrant ainsi
une petite chance d’identifier le lieu en question. Mais, il constate
avec stupéfaction des changements réguliers dans le dessin comme s’il
était animé par une tragédie survenue dans l’endroit représenté…
Notre avis :
De l’italien "manière noire", le mezzotinto est une technique de gravure
semblable à celle du lavis permettant de créer des effets saisissants de
clair obscur. De là, il est facile d’imaginer le rendu d’une maison peu
engageante et, de surcroit, en proie à des changements graphiques
inexplicables. Mais il n’est pas nécessaire d’être expert en peinture
italienne pour profiter de ce conte qui fait facilement froid dans le
dos. Son auteur, enseignant, passionné d'antiquités, de manuscrits
anciens et d’archéologie et auteur de nouvelles fantastiques, d'ouvrages
bibliographiques et d'études sur l'occultisme, puise avec délectation
dans ses différents répertoires pour construire une intrigue impossible
qui devient étrangement crédible. Notamment grâce à un effet visuel très
efficace dans les récits d’épouvante : il suffit de détourner le regard
d’un tableau quelques instants pour remarquer, du coin de l’œil, que
celui-ci a soudainement changé ou bougé. Dès cet instant, un frisson
vous parcourt l’échine. Avez-vous rêvé ou est-ce bien réel ? Ainsi,
comme dans le "Horla" de Maupassant, il est alors normal de mettre au
point des stratagèmes pour valider les faits, surtout quand le
protagoniste est seul témoin du phénomène. Avec "Mezzo-Tinto", Montague
Rhodes-James, écrivain préféré de
Simon Marsden, spécialiste de la photographie de lieux hantés,
réussit une énigme plutôt rare de dessin animé ou de dessin... hanté !
O.V.
Extrait :
« Comme il éteignait la lampe, la gravure capta son regard. La vision
faillit lui faire lâcher sa chandelle – il affirme aujourd’hui que s’il
avait dû être plongé dans les ténèbres à ce moment-là, il aurait eu une
attaque. Mais il en alla autrement, et il put reposer la chandelle sur
la table et examiner la gravure à loisir. Ahurissant ! C’était
strictement impossible et, néanmoins, le fait était là : il y avait
maintenant un personnage au beau milieu de la pelouse, devant la maison,
là où il n’y avait rien ni personne à cinq heures cet après-midi. »
Source
: "Un bouquet de fantômes", anthologie de Barbara Sadoul, Librio, 2001
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