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Propos recueillis par Olivier Valentin
La maison de Claude
Lecouteux est hantée ! Mais par qui ? Ou par quoi ? Point de fantôme, ni
de revenant dans le nouvel opus de ce professeur de littérature et de
civilisation au Moyen Âge à la Sorbonne, spécialiste des créatures
mythologiques, des morts et de la magie, des centres d'intérêts qui lui
ont valu la déconsidération de bon nombre de ses collègues
universitaires.
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En effet, ses
détracteurs, bien qu’ignorants en la matière, lui reprochent de
s’être fourvoyé hors des sentiers battus. C’est bien mal
connaître ce chercheur en anthropologie qui, doué pour lire de
nombreuses langues anciennes, sait décrypter les vieux écrits
tombés dans l’oubli. A quelques jours d’une retraite bien
méritée, il m’a reçu chez lui, dans son bureau, fier de sa
bibliothèque et de ses collections, hommages d’un patrimoine
caché qu’il a revisité en fin limier des traditions populaires.
Silhouette chétive, barbe grisonnante, expression soignée,
Claude Lecouteux manipule son sujet avec humour et dextérité. Il
n’embrasse aucune superstition à l’aveugle. Pour lui, tout a du
sens, même l’extraordinaire. Il n’hésite pas à égratigner les
idées reçues pour nous faire entrer, par la petite porte de
l’histoire des mentalités, dans un univers étrange peuplé de
fées, de sorcières, de vampires, d’elfes et de fantômes.
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A l’heure où notre
société s’est industrialisée à outrance, en proclamant toutes
puissantes la raison et la
science dès l’âge des Lumières, un écrivain cherche
à comprendre ce qui, malgré tout, réenchante le monde. Les poltergeists
font partie de ces phénomènes qui, au-delà des tentatives sérieuses
d’explication, alimentent toujours les fantasmes. Pourquoi ? Parce que
l’homme a besoin de surnaturel. C’est un besoin vital qui fait partie de
ses gènes, depuis la nuit des temps. Et pour longtemps encore…
Maison-Hantee.com :
Professeur, après les fées, les sorcières, les loups-garous, les
vampires, les nains, les elfes, les fantômes et les revenants, vous vous
êtes intéressé pendant 6 ans aux poltergeists, ces esprits frappeurs qui
envahissent les maisons hantées. Pourquoi ce sujet qui échappe à votre
répertoire mythologique habituel pour nous faire entrer dans le monde
plus scientifique de la parapsychologie ?
Claude Lecouteux :
D’abord, il y a une filiation naturelle avec d’autres ouvrages que j’ai
rédigés. En étudiant les nains, les elfes, les démons du terroir ou les
génies de la maison, mon attention a été attirée par des motifs
récurrents, sans explication véritable. Ces motifs sont le bruit, le
tapage, des déplacements d’objets que j’avais déjà côtoyés lors de mon
étude sur les fantômes et les revenants. Surtout des revenants. Je suis
alors tombé sur un problème. Jusqu’à présent, j’ai toujours réussi à
remonter le long des filiations entre les être fantastiques. Puisque, au
fil des siècles, des traditions de provenances diverses se sont
amalgamées, stratifiées, pour donner les individus que l’on connaît dans
les contes, les légendes ou les romans, et même au cinéma. En revanche,
concernant les poltergeists, j’ai eu plus de mal à démêler la toile.
Tout ce qui avait été écrit n’était pas satisfaisant pour moi. J’ai
inévitablement fait le rapprochement avec le phénomène
parapsychologique, dont la dimension scientifique est reconnue
aujourd’hui, la psychokinèse. J’en ai d’ailleurs discuté avec le Docteur
Philippe Wallon, auteur de Expliquer le paranormal
(1). Certes un livre sortait du lot, celui
d’un jésuite anglais, Herbert Thurston (2), mais aucune
référence, ni rien de vérifiable. Ce qui est contraire à ma méthode de
travail.
J’ai alors pris conscience que tous les
témoignages dataient du 19e siècle. Je me suis dit : aurions-nous eu
subitement une recrudescence des phénomènes de poltergeist à cette
époque-là ? Pas possible. Car, dès lors que c’est entré dans le
psychisme humain ou la physiologie humaine, on peut remonter plus loin.
Ce fut mon postulat de départ. Les esprits bruyants, tapageurs et
lanceurs d’objets ont formé mon axe directeur. L’enquête s’est alors
révélée passionnante. Je croyais tout savoir sur les esprits frappeurs.
Mais j’ai découvert qu’ils existaient depuis deux mille ans. Alors
pourquoi ont-ils été dissimulés à l’attention des chercheurs jusqu’au
19e siècle ? En fait, ils étaient déguisés, apparaissant sous l’identité
de morts, de diables, de sorciers ou de nains. C’est donc la perception
et l’interprétation des phénomènes de psychokinèse qui ont évolué au fil
des siècles pour aboutir à l'analyse scientifique rigoureuse que nous
connaissons.
Maison-Hantee.com :
Lors de notre précédente entrevue, vous nous avez évoqué ce projet
d’écriture. Vous aviez mené une enquête auprès d’une centaine de
personnes, étudiants, collègues ou libraires, pour leur demander leur
définition du poltergeist. Et vous avez été surpris du résultat…
Claude Lecouteux :
Oui ! Beaucoup de gens ignorent ce qu’est un poltergeist ! D’autres ont une
vague idée. Mais j’ai été déconcerté par les lacunes à l’université même
où je travaille ! J’admets que Monsieur Tout-le-Monde ignore la
définition d’un poltergeist. Mais j’ai été profondément troublé par
l’ignorance en la matière des professeurs d’histoire, de littérature ou
de langues, pourtant hyper cultivés.
Maison-Hantee.com :
Vous listez des témoignages dans votre introduction.
Claude Lecouteux :
Une étudiante a même évoqué la présence de poltergeists dans Harry
Potter. Or, je n’ai jamais lu Harry Potter. Voilà quelqu’un
qui m’a apporté une référence de plus…
Maison-Hantee.com : A
l’abri de toute interprétation individuelle, peut-on définir précisément
un poltergeist ?
Claude Lecouteux :
A l’heure actuelle, la définition scientifique est la suivante :
phénomène de psychokinèse incontrôlée qui surgit de préférence chez de
jeunes personnes au moment de la crise d’adolescence. C’est pourquoi on
trouve toujours, dans les témoignages, le même type de protagonistes,
soit à la source, soit victime du poltergeist. Souvent des enfants, des
jeunes filles de 12 ou 14 ans, généralement des servantes. Les
témoignages recueillis correspondent donc aux témoignages des enquêtes
scientifiques récentes.
Maison-Hantee.com : A
l’origine, le titre de votre livre devait être Histoire des
Poltergeists. Or, vous nous avez dit que l’éditeur voulait mettre
La maison hantée en titre et Histoire des Poltergeists en
sous-titre, pour que ce soit "plus parlant" selon vos mots. N’est-ce pas
paradoxal ? Quand on dit qu’une maison est hantée, c’est généralement
par un fantôme, non par un phénomène produit inconsciemment par l’être
humain.
Claude Lecouteux :
Pour moi, c’est tout le dossier des maisons hantées qui est à revoir !
On découvrirait très vite qu’il n’y a pas que des fantômes ou des
revenants mais aussi des poltergeists. Je crois avoir réussi à le
démontrer dans mon livre. Les hantises peuvent être aussi bien
acoustiques que visuelles, ou les deux en même temps. Entendre un objet
tomber, c’est une chose. Le voir se déplacer tout seul en est une autre.
Nous sommes dans l’effet audiovisuel ! (Rires)
Maison-Hantee.com :
Vous renvoyez donc le fantôme à la littérature fantastique et le
poltergeist à un univers plus rationnel.
Claude Lecouteux :
Pas forcément. Pour moi, le fantôme est une manifestation de songe, une
émanation de l’esprit. Dans mes textes anciens, le revenant est, quant à
lui, un être de chair et d’os, qui vous prend à la gorge, parfois pour
vous tuer. Ce sont des formes de hantise. Les poltergeists en sont une
autre. On peut même les rapprocher des phénomènes de combustion
spontanée.
Maison-Hantee.com :
Comment la perception de ce phénomène, quasi diabolique au Moyen Âge,
a-t-elle évoluée au cours des siècles ? Comment le poltergeist s’est-il
incarné dans l’histoire des mythologies ?
Claude Lecouteux :
Il faut distinguer la mythologie chrétienne de la mythologie populaire.
Comment les
gens ont ressenti ces phénomènes ? Dans la mythologie païenne,
il est hors de question de les attribuer au diable, simple vue
de l’esprit. Par contre, les partisans de cette mythologie
acceptent la présence d’entités de proximité que l’on appelle
lutins, farfadets ou nains, en fonction des terroirs. Dans la
tradition populaire, ce sont les génies de la maison qui
manifestent leur mécontentement par un tapage inexpliqué. On
corrige alors nos comportements pour se réconcilier avec ces
personnages invisibles. |
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Maison-Hantee.com :
C’est une vision un peu moralisatrice, non ?
Claude Lecouteux :
En quelque sorte. Avec ces créatures surnaturelles qui influencent notre
quotidien domestique, nous sommes au cœur de l’ADN de l’imaginaire. Or,
l’imaginaire évolue au fil des cultures, des religions dominantes et des
faits historiques.
Maison-Hantee.com :
Tout cela est fort sympathique quand cela reste dans le registre du
merveilleux. Mais ce n’est pas toujours le cas. Quand il devient
problématique et que la victime y consent, un phénomène de poltergeist
peut conduire à l’exorcisme. Or, vous rapportez quelques histoires
d’exorcisme, dont certaines défient la raison. Cela ne vous effraie
pas ?
Claude Lecouteux :
Non, c’est normal ! Dès lors que tout a été tenté en vain, il ne reste
plus qu’une solution : le surnaturel. Or,
le surnaturel immédiat dans
une société occidentale, c’est le christianisme ! Autrefois, on faisait
appel au magicien ou au sorcier. Aujourd’hui, c’est le prêtre. Or, il
reste un peu magicien, des dizaines de textes pouvant le confirmer…
Maison-Hantee.com : Je
sens que vous allez vous faire des amis…
Claude Lecouteux :
(Rires) C’est de notoriété publique ! Depuis le Moyen Âge, on a
toujours interdit aux prêtres de pratiquer la magie ou de fabriquer des
amulettes. Et la mentalité n’a pas évolué depuis deux mille ans. Les
réactions seront toujours les mêmes ! Grattons le vernis de la
civilisation, on trouve les peurs, les croyances et les superstitions.
Tout est là, sous-jacent.
Maison-Hantee.com : Et
de plus en plus caché…
Claude Lecouteux :
Oui, pour éviter de passer pour un idiot. Vous connaissez Jung ? Il a
étudié les fantômes et les revenants en menant une grande enquête en
Suisse (3). Pour revenir à l’exorcisme, on s’adresse à l’exorciste comme à
un magicien. Vous trouverez des références dans mon livre. Or, en y
regardant de près, vous êtes atterré par la naïveté des protagonistes.
Forts de leur foi, ils pensent que cela marche à tous les coups. Mais ce
n’est pas toujours le cas. Au 19e siècle, le taux de réussite est élevé.
Beaucoup moins dans les temps plus reculés.
Maison-Hantee.com : A
lire votre bibliographie en fin d’ouvrage, vous avez nourri votre
réflexion par des dizaines de lectures : livres anciens, études,
anthologies,... Entre autres, on trouve Calmet, Flammarion, Bozzano ou
Underwood qui se sont penchés sur de nombreux cas de hantises. Quel
recul avez-vous pris par rapport à leurs méthodes d’investigations et
leur approche des phénomènes ?
Claude Lecouteux :
Je ne peux pas procéder de la même façon. Ils recueillaient des
centaines de témoignages sans possibilité de vérification. Si vous
entrez le mot "poltergeist" dans un moteur de recherche sur internet,
vous allez trouver des dizaines de témoignages sans fondement. Je
pourrais moi-même mystifier la toile avec des récits de pure invention.
En outre, Flammarion est celui qui m’a le plus intéressé. L’amplitude de
son enquête et le recul qu’il a manifesté sont des exemples de
méthodologie car il n’impose aucun jugement.
Maison-Hantee.com :
Comme vous ! Dans votre introduction, vous écrivez : « Comme à notre
habitude, nous laisserons parler les textes et, avec la distance
requise, en proposerons une analyse objective qui ne cherche pas à
imposer un point de vue : libre à chacun de se forger sa propre opinion
à partir des faits ». Mais quelle est réellement la vôtre ?
Claude Lecouteux :
Dans mes études, je pratique la distanciation universitaire. Et c’est
obligatoire pour sauvegarder sa réputation professionnelle. En outre, je
refuse d’imposer mon point de vue. Avec l’irrationnel, il n’y a pas une
opinion mais des myriades d’opinions qui dépendent toutes de la culture
de chaque individu. Moi, je présente les faits et pose les accents pour
orienter le lecteur vers une interprétation, en attirant son attention
sur des faits qui pourraient lui échapper.
Maison-Hantee.com :
Votre interprétation personnelle ou un agrégat de la pensée ambiante ?
Claude Lecouteux :
Dans mes livres, je ne crois pas qu’on puisse extraire le fond de ma
pensée. Sinon, je deviendrais un auteur anglo-saxon étudiant les
poltergeists.
Maison-Hantee.com : Où
est la nuance ?
Claude Lecouteux :
Ils n’ont aucun recul ! Ils se projettent dans leurs analyses,
légitimant ainsi leurs croyances. Dans son livre sur les phénomènes de
hantise (2), le Révérend Père Thurston fait un véritable credo. Et
cette attitude de parti-pris a largement contribué à déconsidérer toutes
les études sur le sujet.
Maison-Hantee.com :
Sans y croire aveuglement, il faut tout de même une certaine tolérance
pour aborder l’irrationnel. Alexandre Dumas disait : « Les fantômes ne
se montrent qu’à ceux qui doivent les voir ». Qu’a-t-il voulu dire pas
là ? Qu’il faut une acuité qui nous prédispose à percevoir le phénomène,
sans chercher spécialement cette intervention. Or, vous avez toujours su
garder cette réserve à l’égard du surnaturel ?
Claude Lecouteux :
Au grand désespoir des disciples du surnaturel, je suis comme saint
Thomas. Et je n’ai toujours rien vu ! (Rires) Ni moi, ni les
autres n’ont expérimenté semblable phénomène. Je n’ai vu ni fantôme, ni
revenant, et n’ai jamais été victime de hantise. Je reçois du courrier.
Une fois, on m’a adressé la photo d’un prétendu fantôme, prise par une
caméra de surveillance d’une maison près de Beauvais, en l’absence du
propriétaire. C’est troublant. On distingue la silhouette d’un prêtre
habillé à la mode du 19e siècle qui flotte au-dessus du sol, sans ombre
portée. J’ai transmis la photo à Philippe Wallon sans chercher à me
prononcer. Si vous me poussez dans mes derniers retranchements, je vous
dirai ceci : dans l’état actuel de la science, il y a des choses qu’on
ne peut pas expliquer… pour l’instant !
Maison-Hantee.com :
Dans Histoires magiques de l’histoire de France, Guy Breton
déclare : « Les spécialistes des mythes expliquent que l’homme, pour se
rendre maître du monde, avait deux voies à sa disposition : la voie
grossière et la voie subtile. La voie grossière est celle que
nous avons empruntée. Elle nous a conduits à inventer le téléphone, la
radio, la télévision, les chemins de fer, l’automobile, les avions, les
fusées, le cinéma, la bombe atomique, etc., c’est-à-dire des objets. La
voie subtile est celle qui utiliserait uniquement toutes les ressources
et toutes les facultés de l’esprit humain : la télépathie, la
lévitation, la voyance, la télékinésie, la bilocation, etc. Facultés qui
s’atrophièrent, faute d’usage, depuis que nous avons emprunté la voie
grossière ». A votre avis, avons-nous trop ignoré notre sixième sens ?
Claude Lecouteux :
C’est trop schématique. Nous avons un cerveau qui est
émetteur-récepteur. Chaque personne possède un nombre différent de
gammes d’ondes. Celui qui en a plus révèle des facultés psi et
appréhende des phénomènes plus énigmatiques car il exploite une partie
supplémentaire de son cerveau. Mais c’est généralement à son insu ! On
ne sait pas maîtriser ces facultés. Demandez à Philippe Wallon ! Des
gens qui se croient devenus fous viennent le consulter. Alors peut-être
que certaines personnes sont capables de maîtriser ces aptitudes. C’est
la voie qu’on choisit les moines tibétains par exemple. Mais
je pense
qu’il y a beaucoup d’escroqueries derrière le troisième œil. Il y a une
voie spirituelle, certes. Cependant, elle implique un détachement
complet de l’homme animal.
Maison-Hantee.com :
Pour vous, cela ne fait donc aucun doute qu’il n’y a aucun agent
surnaturel derrière le poltergeist. C’est un phénomène psychokinétique
tout à fait explicable, malgré son étrangeté. Pourquoi continue-t-il
alors à alimenter les fantasmes, même de nos jours ?
Claude Lecouteux :
Plus le monde se mécanise, plus l’homme a besoin d’un contrepoids, en
l’occurrence le surnaturel. C’est magnifique de croire au surnaturel !
Vous êtes en situation de détresse, vous faites un pèlerinage ou une
prière. Vous vous tournez vers le surnaturel.
Maison-Hantee.com :
Pourquoi rapprochez-vous autant le religieux du surnaturel ?
Claude Lecouteux :
Parce que les frontières sont poreuses entre la foi et la magie. Il
existe une magie chrétienne, ne l’oublions pas ! Prenez la vie des
grands saints. C’est très empreint de mythologie, sur la base d’éléments
non chrétiens. En outre, dans la magie, on distingue la blanche et la
noire. La blanche était très en vogue pendant la Renaissance où chaque
personnalité possédait son astrologue personnel. Quand à la noire,
c’était l’affaire du nécromant. L’une fut acceptée par le christianisme,
l’autre bannie. Historiquement, il y a eu concurrence ! Si l’Eglise ne
donnait rien, on se tournait vers l’ésotérisme. Et cette mentalité date
du 8e siècle !
Maison-Hantee.com :
Cette quête du mystérieux et de l’étrange n’est-elle pas un retour aux
sources, au mythe fondateur ?
Claude Lecouteux :
En effet, à l’heure actuelle, c’est devenu une quête car, autrefois, le
surnaturel était communément admis. L’âge des Lumières a cherché à
désenchanter le monde. Mais même Voltaire n’était pas d’accord avec
cette volonté de destruction du merveilleux ! Et aujourd’hui, il y a de
nouveau un engouement pour les temps anciens et les vieilles croyances.
Voyez les publications sur les korrigans et autres créatures
mythologiques !
Maison-Hantee.com :
Même ceux qui se réclament de Descartes pour déstabiliser le surnaturel
ne savent pas qu’il a lui-même été sujet à une aventure magique où sa
philosophie du cartésianisme lui aurait été inspirée en songes. Que les
détracteurs de l’irrationnel se plongent dans ses Olympiques, un
ouvrage où Descartes défend l’idée des facultés encore inutilisées de
l’être humain, lui permettant d’être l’égal des dieux de l’Olympe ! Sans
parler de l’envoûtement dont Blaise Pascal aurait été victime dans son
enfance et que son père, Etienne Pascal, grand notable de province,
aurait pris très au sérieux. On peut dire que les Lumières n’ont pas
beaucoup fait d’ombre au paranormal… (Rires)
Claude Lecouteux :
J’ai un ami, professeur à la retraite, qui a consacré une étude à la
sorcellerie contemporaine. C’est effarant les pratiques qui subsistent
encore de nos jours, malgré la prédominance des sciences et des
techniques !
Maison-Hantee.com :
Qu’attendez-vous d’un livre sur les poltergeists ? A qui
s’adresse-t-il ?
Claude Lecouteux :
Ce livre s’adresse en priorité à mes étudiants. C’est un relais à mes
séminaires. Il s’adresse aussi à toute personne qui n’est pas bornée par
des œillères culturelles. Qui possède une ouverture d’esprit. Car
je ne vous
cache pas qu’auprès de mes collègues, je suis un folkloriste. C’est à
dire le degré zéro sur l’échelle des valeurs de la Sorbonne !
Maison-Hantee.com : Et
comment vos proches jugent-ils les sujets auxquels vous vous êtes
intéressés dans votre carrière ?
Claude Lecouteux :
Certains collègues sont de vrais amis, des chercheurs aberrants comme
moi, qui refusent de fouler les sentiers battus et souffrent eux-mêmes
de leurs collègues, même s’ils apportent des voies nouvelles, de la
pluridisciplinarité et de la diachronie. Un phénomène que l’on suit
depuis mille ans commence à peser lourd, scientifiquement ! Et puis, mon
épouse est mon meilleur critique ! Elle me fait très justement remarquer
que ces sujets facilitent les rencontres avec des spécialistes
d’horizons divers. Ce qui est profondément enrichissant.
Maison-Hantee.com :
J’ajouterais même que c’est un sujet qui met les gens à l’épreuve, les
obligeant à se révéler face à un thème sensible. Et on découvre des
individus dotés d’un bon sens déconcertant malgré l’étrangeté des sujets
traités. Ce qui constitue une petite famille de passionnés raisonnables,
insensibles au charme des médias trop racoleurs, mais tellement plein
d’humour et de poésie : scientifiques, historiens, anthropologues,
anthologistes,…
Claude Lecouteux :
C’est un challenge difficile car il y a beaucoup d’écueils qui
aboutissent généralement à la sempiternelle et agaçante question : Y
croyez-vous ? Combien de journalistes vous la posent ! Là n’est pas la
question ! Moi, j’étudie pourquoi les gens y ont-ils cru ou y
croient-ils encore. Point final.
Maison-Hantee.com :
Erick Fearson, chasseur de fantômes, avec qui je travaille sur ce site
est aussi victime de la même vision étroite de la part des observateurs.
« Croyez-vous aux fantômes ? » lui demande-t-on souvent. On aurait envie
de parodier l’humoriste Bigard en répondant : « Bien sûr que non, je n’y
crois pas mais je les chasse quand même parce que je suis trop stupide
pour faire autre chose… ». Plus sérieusement, il faut leur renvoyer soit
une autre question (qu’est-ce que vous entendez par fantôme quand vous
me demandez si j’y crois ?), soit par la célèbre répartie de la marquise
du Deffand : « Je n’y crois pas mais j’en ai peur ! »
Claude Lecouteux :
(Rires) Pour revenir à votre question sur le but de mon livre, je
vous dirais que j’écris pour partager mes connaissances. Je trouverais
dommage que le temps investi dans une enquête ne soit pas profitable aux
autres. Mon ambition est de transmettre ce que j’ai découvert. Pour moi,
c’est la clef. Quant à l’impact auprès du public, je manque de retour, à
l’exception de quelques lettres de lecteurs.
Maison-Hantee.com :
Comment communiquez-vous sur la sortie de votre livre ?
|
Claude
Lecouteux : Je ne fais pas de promotion. Ou alors
dans le cadre d’interventions comme celle que je fais pour
l’I.M.I. au mois de décembre prochain, à Paris
(4). J’irai parler
des poltergeists puisque c’est leur domaine (rires).
Parfois, des bibliothécaires ou des conservateurs me demandent
de donner une conférence. Comme à Montpellier où j’ai parlé sur les vampires. Mais cela reste anecdotique. Mon
lectorat est composé de cinq à six mille personnes environ. Et,
comme m’a dit mon éditeur, quand ils achètent un de mes
ouvrages, ils les achètent tous. Ça me va. Pour Fantômes et
Revenants au Moyen Âge (5), j’en ai vendu
à peu près dix mille exemplaires,
du fait de quatre tirages club. Autre succès : Les Nains et
les Elfes au Moyen Âge (6).
Maison-Hantee.com : D’après le courrier que vous recevez,
avez-vous établi un profil de votre lectorat ?
Claude
Lecouteux : C’est très varié. Cela va du stomatologue
à la retraite à Monsieur Tout-le-Monde… |
Maison-Hantee.com :
Professeur de littérature et civilisation du Moyen Age à l’Université de
Paris IV-Sorbonne, vous prenez bientôt votre retraite. Quels sont vos
projets ?
Claude Lecouteux :
J’arrête l’enseignement. J’ai quelques conférences en vue, notamment une
sur le thème des cloches magiques, à Rennes, au mois de décembre. Vous
savez, j’ai eu trois axes d’étude dans ma carrière : les êtres
fantastiques, les morts et la magie. Et puis, j’ai commencé une étude
sur les forgerons mythiques.
Maison-Hantee.com :
Vous abandonnez les créatures fantastiques ?
Claude Lecouteux :
Disons que je reviens à mes premières amours.
Maison-Hantee.com :
Bonne retraite, Professeur.
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(1) Expliquer le paranormal : Les
Niveaux du Mental, Philippe Wallon, Albin Michel, 1996
(2) Ghosts and Poltergeists,
Herbert Thurston, 1953
(3) Apparitions : Fantômes, rêves et
mythes, Aniela Jaffé, préface de C. G. Jung, Editions Mercure de
France / Le Mail, collection Science et conscience, 1983
(4) Voir les
informations sur le site de l'Institut Métapsychique International
(5) Fantômes et Revenants au Moyen Âge,
Claude Lecouteux, Imago, 1986
(6) Les Nains et les Elfes au Moyen Âge,
Claude Lecouteux, Imago, 1988
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L'AUTEUR !
Jeu terminé !
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dernier livre de Claude Lecouteux, La maison hantée : Histoire des
Poltergeists, dédicacé par l'auteur, en répondant, les premiers, aux
trois questions suivantes (dans la limite du stock disponible dédié à ce
jeu) :
1) En quelle année, Claude Lecouteux
a-t-il publié un livre sur la mythologie des vampires ? (indice)
2) Dans quelle ville se situait la maison
d'où provenait la photographie du fantôme d'un curé du 19e siècle
adressée à Claude Lecouteux ? (indice dans cette page)
3) Comment s'appelle le héros décédé du
roman de Claude Lecouteux, Le Mort aventureux ? (indice)
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coordonnées postales (France métropolitaine) pour recevoir votre livre, à
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ni conservées, ni communiquées à des tiers. Date limite de participation
: jusqu'à épuisement du stock.
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leur livre prochainement.
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© Photographies : Olivier Valentin |